L’amour d’un maître

Héloïse et Abélard

« Où est la très sage Heloïs,
Pour qui fut chastré et puis moyne
Pierre Esbaillart à Sainct-Denys… ? »

François Villon, Balade des dames du temps jadis (1489)

Photo : Musée Condé, Chantilly. XIVème siècle.

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Né en 1960, professeur de philosophie pendant plus de trente-cinq ans dans le secondaire, l’auteur est passé par Freud et la psychanalyse (Freud au cas par cas, Leuven University Press, 2015) avant d’en revenir au travail philosophique autour de questions éthiques.

Je vous propose d’être acteur de la naissance de cette pièce avec l’aide des Editions Maïa. Plus les préventes seront nombreuses, plus elle sera promue et diffusée, peut-être même un jour mise en scène ! En retour, vous serez les premiers à la lire en la recevant chez vous, frais de port inclus (19 €, dont 2 € de frais de port). Je tiens à remercier d’ores et déjà l’Association Culturelle Pierre Abélard (A.C.P.A.) pour le soutien qu’elle m’a apporté dans la réalisation de ce projet.

Extraits

BADINAGE

ACTE I, Scène 4

Abélard, Héloïse
(1115. Ile de la Cité. Dans la chambre d’Héloïse)

Héloïse : Je suis très heureuse que vous ayez apprécié mes vers.
Abélard : Oui, vraiment, je suis sincère, ils sont parfaitement écrits et j’ai pris beaucoup de plaisir à vous les entendre dire.
Héloïse : J’ai travaillé tard pour les apprendre. Et je me suis relevée plus d’une fois, dans la nuit, pour en corriger le style.
Abélard : Votre syntaxe latine est parfaite, votre vocabulaire est riche et vos images parlent d’elles-mêmes.
Héloïse : Je vous l’ai dit, voilà bien longtemps qu’on ne trouve plus de raisons de me corriger pour une faute de latin. Mais, si je puis me permettre, votre commentaire est un peu… scolaire. Pour progresser, j’aimerais y voir plus clair sur ce plaisir que mes mots vous ont fait ressentir.
Abélard : Vos mots m’ont touché, parce que vous les avez bien trouvés et que vous avez su en faire une musique. En vous écoutant, j’entendais bien plus que ce que vous disiez.
Héloïse : Mes mots m’auraient-ils trahie ?
Abélard : Au contraire, la mélodie de votre voix a donné vie à ce que vous vouliez dire. Ce que vous avez pensé, vous me l’avez fait sentir.
Héloïse : Ah ! J’ai cru un instant que mes paroles avaient dévoilé quelque secret.
Abélard : Nullement.
Héloïse : Mais… n’avez-vous pas un peu tenté de me le faire croire ?
Abélard : Un maître ne fait pas croire, Héloïse, il dispense du savoir.
Héloïse : Que redire à cela ! Que voulez-vous alors me faire « savoir », Maître Abélard ?
 Abélard : Eh bien qu’en rhétorique, comme vous l’avez déjà compris, tout tient à la force de l’élocution et de la diction, chère damoiselle. Mais que pour aller plus loin, il vous faut lire Cicéron.
Héloïse : Je le lis déjà, figurez-vous ! J’aime traduire ses discours. Mais parlez-moi de lui, Maître, oui, parlez m’en, je cède à votre pédagogie.
 Abélard : Puisque vous cédez…
Héloïse : … à votre pédagogie.
Abélard : Et à votre amour pour Cicéron que je sens très vif, peut-être aussi vif que le mien.

SCANDALE

ACTE II, Scène 2

Abélard, Héloïse, Fulbert, le Prévôt.
(1115. Dans la chambre d’Héloïse. La porte s’ouvre brutalement)

Héloïse : (En se couvrant, ainsi qu’Abélard) Ah !
Le Prévôt : Vous aviez raison, Fulbert, on vous avait bien informé.
Héloïse : Mais que sont ces façons, mon oncle, on frappe, non, avant d’entrer ? Je… je vais vous expliquer…
Fulbert : Tudieu ! faut-il croire mes yeux ou bien me les arracher ? Ma nièce, dites-moi ce que ce scélérat fait dedans vos draps ?
Le Prévôt : Leur forfaiture est claire, Fulbert ! Nous la notifierons.
Abélard : (En se rhabillant) Je comprends votre colère…
Fulbert : (Au Prévôt) Est-ce qu’il me parle ? Que dit-il ? Qu’il comprend ma colère ? Mais quelle finesse d’esprit ! Quelle délicatesse ! Apprenez à cette intelligence subtile que, plutôt que de la comprendre, il ferait mieux de la craindre car celle de Dieu sera douce à côté de la mienne
Le Prévôt : Votre courroux est juste, sieur Fulbert, mais Dieu et Dieu seul, par ses représentants sur terre, se chargera de châtier comme il se doit cet usurpateur qui a abusé de votre nièce sous votre toit.
Héloïse : Laissez-nous vous dire…
Fulbert : Il n’y a pas de « nous » entre vous, je n’ai sous les yeux qu’un criminel, une victime et bientôt un gibet.
Abélard : Laissez-moi alors parler en mon nom.
Fulbert : Tais-toi, traître, suborneur, ton abomination te condamne au silence, ta faute est sans appel, tu n’as rien à dire, laisse-moi juste le temps de trouver les mots les plus avilissants pour te les cracher à la figure.
Abélard : Crachez-les, je les mérite.
Fulbert : Oh ! mais regardez comme il est habile, il va offrir sa repentance, nous étaler des airs contrits alors qu’il y a quelques instants encore il avait bien de l’allant à écarter les cuisses de ma nièce, à la violer et à dévoiler la véritable face de sa chasteté !
Héloïse : Abélard ne mérite pas un seul de vos crachats. Il ne m’a pas violée.
Le Prévôt : Prenez garde à ce que vous dites, damoiselle Héloïse. Ne vous rendez pas complice de l’offense qu’on vous a fait subir.
Fulbert : Je ne veux rien entendre de toi, il t’a ensorcelée, il t’a trompée, il a abusé de ta candeur. Sous le manteau du mentor ne se cachait qu’un menteur. Mais tu as l’âme trop naïve pour reconnaître celle d’un infâme séducteur.
Héloïse : Je ne suis pas naïve, mon oncle, et j’y vois souvent plus clair que vous.
Fulbert : Cela t’arrive, en effet, sur des sujets très élevés mais sur ceux de la fange dans laquelle tu t’es laissé trainer, je m’y connais un peu mieux ; et sache qu’un homme, que dis-je, une bête écumante, tout Abélard qu’elle soit de son nom qu’elle salit, qui s’avise de t’enseigner avec son foutre et sa trique, ne le fait pas, apprends-le, par amour de la dialectique.

Résumé de la pièce

Abélard sort d’une joute oratoire qui s’est tenue publiquement dans une église de l’île de la Cité. Le chanoine Fulbert vient à sa rencontre pour lui proposer de devenir le précepteur de sa nièce, Héloïse, qui l’accompagne (I, 1-2). Après quelques hésitations, l’idylle se noue très vite entre les deux protagonistes (I, 3-4). Abélard a perdu le goût de l’étude et demande à son disciple Robert d’assurer à sa place un cours de théologie. Héloïse arrive à l’improviste et participe à une leçon sur la Trinité (I, 5). Fulbert, découvrant les amants sur le vif, est furieux (II, 1-2). Par crainte de représailles, Abélard a envoyé son amante, qui porte leur enfant, chez sa sœur Denise, en Bretagne (II, 3). Bien qu’Héloïse s’opposât au mariage (II, 4), Abélard l’épouse. Après sa mutilation par les gens de Fulbert qui parvient ainsi à se venger, par un accès de honte et de piété, il décide d’entrer au monastère de Saint-Denis, entraînant son épouse à faire de même, la mort dans l’âme, au couvent d’Argenteuil (II, 5-6-7). Plus de dix ans après leur séparation monastique, sœur Héloïse confie à Denise tout le mal qu’elle pense d’Abélard qui l’a, selon elle, abandonnée (III, 1). L’occasion lui est donnée, un jour, de le rencontrer et de s’expliquer avec lui sur les raisons de son silence (III, 2). Le temps a encore passé et Héloïse reçoit dans le couvent dont elle est devenue abbesse, Pierre le vénérable, abbé de Cluny, venu lui donner des nouvelles d’Abélard qui a été de nouveau accusé d’hérésie (III, 3). Dans cette conversation libre et amicale, il apparaît que le sentiment d’Héloïse pour son maître d’autrefois n’est pas mort. Cet amour contrarié retrouve progressivement de ses couleurs dans le monologue final, à l’annonce du décès de frère Abélard (III, 4).

L.M.J. Billardet. 1847. Abélard instruisant Héloïse. Détail. Musée d’arts de Nantes

  • Les étapes de création

    Mon objectif est d'atteindre 990 € de pré-ventes afin de rendre possible la réalisation des maquettes, la correction, l'impression et la promotion. C'est pourquoi je fais appel à vous, auteurs, lecteurs et amoureux des mots ! Votre précommande permettra à mon projet de devenir réalité grâce à une équipe de professionnels.