Je destine ce livre à toutes les victimes de violences intrafamiliales que personne n’a su voir, ou n’a voulu voir. Ce récit est également un support, un outil d’aide aux thérapeutes, professionnels de la santé mentale. Ce livre a également toute sa place dans les associations de soutien contre la maltraitance infantile. Les foyers de jeunes en perdition en quête de repère. Il a sa place dans les bibliothèques… Certes, il n’est sans doute pas très original car nombreuses sont les personnes qui ont souffert et souffrent encore dans leur chair et leur âme de la brutalité d’un proche. Les mots sont là, enfin. Je n’en pouvais plus de les écrire et de les réécrire, depuis tant d’années, au fil de mon évolution, au fil de mes souffrances, de mes colères, des trahisons, au fil de mes tentatives de suicide, de mes questionnements sans réponse, au fil de mes hurlements à l’injustice, au fil de mes réflexions et de ma transformation.

Moi, je connaissais surtout l’ortie pour ses poils urticants. Marâtre était une avant- gardiste, elle connaissait avant tout le monde les vertus insoupçonnées de cette plante Ô combien laide et peu attirante, mais qui prenait déjà soin de ma peau et de mon corps !
(Humour bien sûr !)
Elle avait trouvé LA punition par excellence. Quel bonheur pour elle quand elle s’exclamait :
— Monte dans ta chambre et mets-toi en tenue d’Eve !
Je savais ce que ça voulait dire : j’allais avoir droit à ma friction quotidienne. Non ! Je ne profitais pas d’une séance de bien-être dans un salon avec massage avec gommage. Par contre, je sais pourquoi aujourd’hui ma peau est si douce et peu ridée. (Humour encore !)
Je montais et me déshabillais en attendant son entrée triomphante. Tremblante, les larmes coulaient silencieusement sur mes joues. Elle arrivait avec son beau bouquet, tel un trophée, le sourire aux lèvres, gantée de sa paire de mappa rose pour ne pas se piquer, pas folle la garce ! S’ensuivait alors une danse endiablée que j’improvisais à chaque fois, mêlant à la fois le tango, le chachacha, le swing et la salsa. En vérité, je hurlais de douleur, je braillais comme un veau, je sautais dans tous les sens, courant dans la chambre, m’enroulant dans le rideau de la penderie à chaque contact avec les plantes. Elle savait que je ne les supportais pas, sinon ça n’aurait pas été drôle. J’avais l’impression de tomber dans une fourmilière, dérangeant les occupants des lieux dans leur quotidien qui se défendent en me ravageant le corps de milliers de piqûres.
Marâtre me badigeonnait avec son bouquet, tel un pinceau géant. Plus je hurlais, plus je me débattais, plus ça durait. Du visage jusqu’aux pieds, elle n’épargnait aucune partie de mon corps. Personne ne m’entendait hurler ? Je ne sais pas, en tout cas personne ne venait jamais voir pourquoi je braillais de la sorte. Mon corps n’était que brûlures et rapidement il se couvrait de cloques. La douleur était insupportable, mais la pire souffrance se situait sur le visage. Je me grattais pendant des heures et des heures !