Kerandel s’inspire à la fois de ce qui existe et de ce qui n’existe pas. C’est l’introspection la plus profonde sur ces héros de littérature qui, face aux difficultés d’un destin orageux, découvrent leurs plus profondes ressources et leurs plus grandes faiblesses. Plus qu’un simple roman héroïque où des hommes et des femmes sont plongés au cœur de leur destin, c’est un hymne à la nature humaine, dans son incroyable beauté et sa laideur. Entre codes connus de la littérature fantastique et réalisme des romans classiques, Kerandel pullule d’âmes écrasées, brisées, meurtries qui redoublent de profondeur, de beauté et de noirceur. C’est le livre qui vous donnera l’impression de croiser quelques fois votre reflet dans le miroir, tout en vous perdant dans les méandres d’un monde complexe aux multiples facettes.

Demetreis se tourna vers les trois jeunes hommes, le regard sévère. C’était donc elle la plus fragile de ces quatre enfants. Un esprit aussi tourmenté pouvait évidemment être problématique, mais il se rappela la promesse faite à Valomon. Il était désormais animé par cette mission. Il avait laissé ces jeunes gens pendant trop longtemps. Peut-être que s’il avait agi plus tôt, Seka n’aurait pas été dans une situation aussi atroce.
— C’est aujourd’hui que vous comprenez votre devoir de protection. Je refuse qu’un autre roi traite un être humain de la sorte. Si Dorian est moins qu’un chien, sachez qu’Eliarys serait son maître en termes de cruauté. Murmura-t-il sombrement. Je compte sur vous pour la protéger. Maintenant, partons. Ce misérable roi ne sera pas tolérant bien longtemps. S’il requiert un départ aussi hâtif, c’est que les tensions grandissent dans sa cité. Vous avez entendu le même nom que moi quitter sa bouche ; il sait que ses jours de royauté sont comptés et il ne vaut mieux pas être dans son sillage. Je ne serai pas étonné de voir son séant bouté hors du trône d’ici peu et je boirai un bon vin pour célébrer sa disgrâce.
Jovan, Mika et Mads acquiescèrent sans rechigner. Pourtant, dans son cœur, l’homme-loup sentait que quelque chose n’allait pas. Il observa les cheveux bruns de la jeune femme qui marchait devant lui, pensif. Pourquoi était-elle si importante et si crainte à la fois ? Elle ressemblait à une ombre, rien de plus. Ses yeux ambrés tombèrent sur les vapeurs sombres qui léchaient ses doigts blancs. Jamais encore il n’avait vu une couleur aussi profonde, et il pouvait ressentir le débordement de sa magie. Il sentait en elle une rage et une force violente, indomptable et beaucoup plus sauvage qu’il n’y paraissait. Quelque chose de déstabilisant pointait dans le regard de Seka.
Comme si tous les ténèbres de ce monde avaient décidé de ne vivre que dans un seul et unique corps.

Crédit illustration : Mel Joy SAN JUAN