Je suis ravi de voir évoluer mes personnages dans ce roman et je suis le premier surpris lorsque je découvre la direction qu’ils prennent, qui n’est pas forcément celle à laquelle je pensais. Je suis alors aussi exalté qu’eux des évènements et des situations dans lesquelles ils se dépêtrent, et des malheurs qui leur arrivent parfois. Je me reconnais en chacun de ces personnages : un jour, précepteur ; le lendemain, lieutenant de la Royale ; et en fin de journée, un corsaire ! Et pourquoi pas dans mon prochain roman : espion du Roi ?

     Pierre est un Normand, au regard clair. Né un 11 mars 1751, il est le cadet d’une vieille famille aristocrate. Enfant, Pierre comprend que sa place n’est plus au domaine. Son frère aîné, Charles, en héritera. Le jeune homme rêve alors d’évasion, d’aventure, de prendre le grand large. L’armée, il n’y échappera pas. Il intègre la compagnie de cadets-gentilhommes pour le service des troupes des colonies de Rochefort, en 1764. A l’école militaire, au bord de la Charente, Pierre va se lier d’amitié avec sept autres cadets. Ensemble, ils vont grandir et apprendre l’art de la guerre. Devenus officiers, ils embarquent pour rejoindre Saint-Domingue et le régiment d’infanterie coloniale de Port-au-Prince.

De Dieppe à Rochefort, des Canaries aux Caraïbes, Pierre va vivre des aventures captivantes. Il ira au bout de ses convictions et de ce qui vibre en lui. De jeune noble normand, Pierre deviendra officier de la Marine Royale. Une épopée aux temps des Lumières.

La richesse de cette épopée, faite d’expériences hors du commun, de courses-poursuites et de batailles, de découvertes et d’exotisme, mais aussi de déboires dans une société monarchique et colonialiste au bord de l’explosion, résonne étonnement avec l’actualité de notre époque contemporaine.

Extrait de Les Lumières Monarchiques – Tome 1 : Une certaine éducation par Emerick Gally

       “Les voiles gonflées, la flottille superbe arrivait fièrement aux Canaries, territoire allié de Charles IV d’Espagne. Les pavillons de lys flottant au vent, les navires 255 accostèrent dans le port de La Palma. Les Canaries, aux paysages verdoyants et aux haies d’hortensias bleus, archipel perdu dans l’immensité marine, dégageaient une sérénité bienvenue. Végétation luxuriante, lacs reposant au fond de cratères volcaniques, ballets de baleines majestueuses ou envolée d’oiseaux paradisiaques…
Situées au cœur de l’Atlantique, à mi-chemin entre Europe et Amérique, les sept îles principales des Canaries étaient une escale indispensable aux navires qui traversaient l’océan Atlantique. Dominé par le volcan Cumbre Vieja, les marins lui prêtaient une multitude de croyances et des chamanes rôdaient sur ses pentes luxuriantes.
Les Français y resteraient deux jours afin de se réapprovisionner en eau douce, en fruits et légumes et de nettoyer jusqu’à fond de cale les navires. L’équipe médicale s’occuperait des derniers malades au dispensaire des frères franciscains. Seuls les officiers avaient l’autorisation de s’aventurer hors du périmètre portuaire.
Pierre mit sa main en visière et observa le port qui, aux dires des marins expérimentés, n’avait quasiment pas changé depuis les voyages des grandes découvertes. Ancré à l’écart vers la jetée, il reconnut le galion corsaire. On y débarquait des coffres sous la surveillance d’hommes armés. Soudainement il recula, quand il aperçut sur le pont principal un homme barbu qui le fixait, lui aussi main en visière.“