« Ma Chère Agathe,

J’ai bien reçu le colis, mais hier à 5 heures. Ils nous le disent le matin au rapport à 11 heures. Tous les jours il y a des mandats ou des colis, mais je l’avais commandé dans une grande boîte en fer au lieu du carton, mais enfin ça ne fait rien j’achèterais une autre boîte de gâteaux au foyer, ça m’en fera deux petites au lieu d’une grande. J’en commanderai plus tard pour faire comme tous les autres.

Ce matin on a commencé à tirer avec une carabine à 15 mètres, deux fois cinq balles chacun. J’ai été un des plus forts avec un autre. Le premier tir, j’ai eu très bien et le second, bien. En attendant, au cœur d’Alger, parait-il que c’est le fichu bordel. Le FLN déclenche des attentats et demain on devrait peut-être sortir en patrouille pour diviser la ville et gérer les musulmans : il faut bien ceinturer tout ce foutoir qu’ils disent les gradés! Ma foi je t’en dirai plus sur une prochaine lettre.

Chaque jour nous apprenons une chose, un jour le garde à vous, un autre le parcours du combattant, comme aujourd’hui nous avons l’arme à la hanche. Le papa doit savoir ça et même le frangin Maurice. Dans la journée on a souvent 5 minutes de repos pour fumer une cigarette, j’avais dit les premiers temps que je fumais mais j’ai arrêté. J’ai touché 7 paquets de cigarettes mais je les ai vendus à un copain. Tu m’as dit sur ta lettre que le Marcel J. a été réformé , j’ai reçu sa lettre aujourd’hui en même temps que la tienne. Tant mieux pour lui. Il ne me dit pas pourquoi, il a sûrement ses raisons, tu demanderas au Roger, il doit le savoir, il a certainement dû lui demander. Et puis tu me dis que le Gilbert B. doit revenir au camp du lido, sitôt que tu seras le jour de son retour, tu me le diras, la cavalerie est juste à côté, c’est justement au foyer de cette dernière que je fais développer mes photos. Je crois que je n’ai plus grand chose à te dire pour le moment, comme je vois, le Maurice s’occupe toujours bien des affaires du Louis. Je termine ma lettre en vous embrassant tous bien fort.

André »