Description
« Alors moi, c’est Hercule, comme le héros grec du dessin animé, je ne sais pas si vous connaissez ? Enfin en un peu moins costaud et aussi en un peu plus intelligent j’espère…
Sûr que si on m’avait demandé mon avis à la naissance, jamais je n’aurais choisi de m’appeler comme ça ! Heureusement mes vrais copains n’emploient jamais ce prénom ridicule ! J’adore celui qu’ils m’ont trouvé. Speedy, comme Speedy Gonzales, la souris d’un autre dessin animé. La plus rapide du Mexique ou de tout l’Ouest je ne sais plus exactement. C’est parce qu’à l’école, comme on dit, y’a pas photo, c’est moi qui cours le plus vite. Je bats même les CM2, alors que je ne suis qu’en CM1, et en plus du mois de décembre…
Pour nos courses, on traverse la cour de récréation. C’est pas l’idéal mais on n’a pas d’autres endroits. On l’a mesurée en début d’année avec notre maître, monsieur Dequerre, en travers il y a cinquante mètres, pile-poil !
Monsieur Tableaublanc, le directeur, dit que je pourrais bien avoir de l’avenir dans ce sport. Alors forcément, depuis moi, j’y crois aussi. Plus tard c’est décidé, quand je serai grand, je serai donc coureur de rapidité. À la télé, ils emploient le mot américain “sprinter”. J’ai déjà commencé à découper des images des meilleurs athlètes dans des programmes télé. Ils sont tous noirs. C’est normal puisque c’est un sport américain ! Enfin moi, ce qui me fait peur, c’est que je ne pourrai pas changer de couleur de peau pour réussir…
Y’a pas de raisons parce que Kalidou, il n’y a pas plus foncé de peau dans l’école, ça ne m’empêche pas de le battre chaque fois à plat de couture.
Par contre, il va falloir que je me muscle vraiment car j’ai remarqué que les meilleurs avaient tous des biceps de déménageurs bretons. C’est curieux d’ailleurs ça aussi, car ce n’est tout de même pas sur les mains qu’ils courent…
Pas la peine que je me mette “la rate au court-bouillon” comme dit souvent maman, parce qu’en ce moment de toute façon, je ne cours plus. Oh, ce n’est pas que je sois moins motivé ! C’est juste que dans le quartier, coïncidence abominable, tous les parents de mes copains ont choisi juillet pour partir en vacances. La poisse…
Nous cette année, bien entendu c’est spécial. Comme on attend ma petite sœur, je crois que je suis condamné à m’ennuyer ici deux mois durant, sans adversaires.
Foutues grandes vacances… »