Le 7 juin 2007
La réflexion qui aura été le fil rouge de ma vie est la suivante : « Je ne veux pas me résigner à mourir de mon vivant ! » C’est une constatation, une conclusion plus qu’une réflexion. À 15 ans, je voulais déjà écrire un livre, je me projetais déjà dans l’écriture : Le titre était : Passion de Vie ! J’ai déchanté de ce présupposé de base, de cette énergie, de cette flamme naissant à l’aube de cette vie. Je suis allée de déceptions en déconvenues, d’épreuves en chagrins. Et pourtant, je me suis battue comme une lionne, me disant que ce n’était pas possible que j’échoue, que l’adversité se transforme en bonheur, en espoir, en sourire. J’étais convaincue que mon énergie, ma volonté, ma détermination, ma force viendraient à bout de ces charges endossées.
Puis, j’ai peu à peu compris que je ne gagnerai pas forcément la partie… En tout cas, pas comme je l’entendais… En tout cas, pas par un revirement rapide de la situation, pas par un coup de théâtre… Mais lentement, à l’usure des forces opposées, à la prévention et protections des miennes… Nos vies sont des romans 29 « Durer, tenir, maintenir » sont devenus mes verbes favoris, fétiches. Avec eux, « Comprendre, chercher, donner du sens ». J’ai connu aussi « douter, souffrir, désespérer, se résigner, renoncer », pire : « ne plus espérer ». Des noms communs, si communs : « solitude, peur, angoisse, désespoir, abandon ». Des plus doux comme « lâcher prise », j’ai mis de longues années à en comprendre le sens, à en chercher l’entrée, la Clef…
Ce que je regrette, dans ma vie, c’est que ce que j’ai appris, je l’ai appris aux dépens de mon capital d’enthousiasme, de joie… Ce que j’ai appris, ce qui a fait l’évolution de mon âme, je l’ai payé au prix fort de la déception, de la désillusion, de cette petite flamme magique qui est en nous. Pourquoi, pour grandir, apprendre, évoluer, faut-il souffrir ? Est-ce nécessaire ? Est-ce obligatoire ? Ce fut ma réalité. Ce furent mes questions. Sans souffrance, n’y a-t-il donc pas d’évolution possible ? Je viendrai au détail de cette vie, de cette histoire. Elle n’a d’intérêt que par le regard que je vais porter sur elle. Ce regard qui se transforme au fil du temps, c’est ce qui fait notre expérience.
Être capable d’écrire aujourd’hui, c’est, mine de rien, une victoire, c’est que j’ai encore la force, l’espoir, voire la prétention de pouvoir encore en faire quelque chose, de cette vie… Nos vies sont des romans… Et la deuxième ritournelle de ma vie, ce fut cette question lancinante sur le thème du libre arbitre et du karma, des destins de vie. Nos vies sont des romans 30 J’ai interrogé et décliné cela à la lumière de plusieurs outils, concepts : psychanalytiques, spirituels, etc. Et ce que j’en ai retenu, c’est que seule la vie, notre vie peut nous éclairer et nous donner les réponses. La vie et quelques livres. À ce jour, je ne sais toujours pas si je suis libre ou assujettie à un destin. Bien malin qui peut y répondre pour lui-même. J’en saurai peut-être plus à la fin de mon livre.
Une vie, c’est un livre ; une vie, c’est un roman. Nous apprenons beaucoup de nos renoncements. Vivre, exister, est-ce savoir renoncer, savoir ne rien vouloir, prendre ce qui vient, renoncer à ce qui ne vient pas. Entre « Aide-toi et le Ciel t’aidera », c’est-à-dire agir, et « lâcher prise » en se remettant Corps et Âme dans une confiance aveugle aux mains de Dieu car lui seul décide, où est le Chemin ? Être et s’incarner est l’œuvre la plus difficile. Il m’est arrivé de toucher ma propre étincelle divine, mon moi supérieur, et à côté de ça, comme je peux me trouver nulle quelquefois. Et pourtant, j’y crois encore, car même si ce matin, je n’avais pas un moral d’acier contre toute attente croyant avoir abandonné l’idée d’écrire, et de dire, je me suis retrouvée assise là avec le cahier et le stylo.
Hier, une femme dans le métro me dit en me voyant penchée sur mon livre : « Vous ressemblez à la Liseuse de Fragonard ! On vous l’a déjà dit ? — Non, mais… — Prenez-en acte, cette femme écrivait… » Mais moi, Cerise, je n’ai pas vérifié si elle écrivait. Mais je crois aux signes ! Le dernier livre donc que j’avais dans les mains est Où tu vas, tu es (Jon Kabat-Zinn).