
Entretien avec Pascal Marcel auteur d’Un aller simple
Quel a été votre sentiment quand votre livre est paru ?
J’ai été transporté. Pendant plusieurs jours, je n’ai dormi que quatre heures à peine par nuit avec une incroyable énergie. Un élan surprenant, une envie débordante. Guitariste, je connais ce sentiment après un concert, l’adrénaline me porte. Mais c’est juste le temps d’une journée. Là, c’est une autre dimension. Je découvre mon livre sur le site de la FNAC, Cultura, dans des librairies et très rapidement à l’étranger aussi. Mon livre s’exporte au Japon, au Portugal, en Belgique dans des librairies francophones. Le tourbillon !!!
Quels ont été les retours des premiers lecteurs ? Que vous ont-ils dit sur votre livre ?
J’ai reçu de nombreux témoignages, beaucoup de messages privés sur les réseaux sociaux, mais aussi de longues discussions lors de rencontres « lectures-dédicaces ». J’ai même reçu une lettre qui m’a particulièrement ému. A chaque fois, ce sont des échanges autour de la question de l’exil.
Dans beaucoup de familles de la diaspora d’Asie du Sud-Est, après l’exil, c’est le silence. Le silence de l’histoire d’avant, le silence de la fuite, le silence de l’arrivée en pays inconnu. Pour la première génération, ceux qui ont fuit, il y a souvent un déclassement social. On passe d’une vie bourgeoise, avec parfois une entreprise, des employés, du personnel de maison à la survie. L’exil se fait avec deux valises et des souvenirs auxquels on ne veut plus penser. On tente de faire table rase et c’est le silence.
Les lecteur.trice.s, à travers mon roman historique, ont retrouvé, dans la petite histoire de mes parents, un peu de la leur. Un peu de celle de leurs parents silencieux qui n’ont pas pu leur raconter la vie d’avant l’exil. Dans la grande histoire, celle de l’Indochine et de la décolonisation, mes lecteur.trice.s m’ont souvent témoigné leur grand intérêt pour les faits historiques de cette Indochine oubliée. L’histoire de l’Indochine est passée sous silence dans les manuels d’histoire, juste quelques lignes.
Mais il y a eu aussi des lecteur.trice.s qui m’ont fait part de leur sentiment d’exil d’une région de France ou d’une famille qui parfois vous éloigne. Je suis toujours très touché par ces retours et je prends toujours le temps de répondre à tous mes lecteur.trice.s. Avec certains, une complicité plus importante existe. Ce sont les lecteur.trice.s de la prévente, les tous premiers. J’échange régulièrement avec eux sur un groupe WhatsApp privé autour du livre, avec des contenus exclusifs pour la soixantaine de membres du groupe.
Que retenez-vous de cette expérience d’édition par rapport à votre travail d’écriture ? En avez-vous tiré des enseignements ?
Même si c’est mon premier roman, je mesure la chance d’avoir été édité. Je connais quelques auteurs qui ont, faute de trouver un éditeur, dû se tourner vers l’auto-édition avec beaucoup de déconvenues. L’accompagnement à chaque étape est indispensable. Faire la maquette, la correction et l’impression d’un livre c’est un métier. Gérer un stock de livres et le distribuer en est un autre. Communiquer autour du livre aussi. Le mien, c’est écrire et échanger avec mes lecteur.trice.s. Alors, un grand merci à Camille pour la pré-vente, à Muriel pour la maquette, à Précilia pour la logistique et surtout à Éloïse, chargée du suivi promotion des auteurs, qui m’accompagne et me guide au quotidien.
Quelle est l’originalité de votre livre selon vous ? A-t-elle été perçue par vos premiers lecteurs ?
J’ai beaucoup de retours sur la petite histoire dans la grande histoire. Le roman historique est une forme d’écriture à la fois documentée et romancée. Ancien documentaliste en lycée à la retraite, les recherches historiques m’ont passionné. Le décès de mes parents a été une terrible épreuve. Raconter leur histoire c’était pour moi les rendre encore un peu présents au détour de chaque mot, de chaque phrase. C’est mon émotion qui a guidé mon écriture. Certains lecteur.trice.s. m’ont même confié avoir lu mon livre d’une traite, sans pouvoir s’arrêter. J’ai provoqué quelques nuits blanches !
Comment s’est passé votre travail d’écriture ? Avez-vous une méthode pour écrire ? Des rituels ou des astuces ?
J’écris pendant des plages de quatre heures en écoutant de la musique traditionnelle vietnamienne, celle de mon enfance. Plus particulièrement avec celle de Khánh Ly, une chanteuse qui souvent me bouleverse. J’ai en tête la structure générale de mon livre. Avant de commencer l’écriture, je réfléchis au début et à la fin sans prendre de notes. Je n’ai pas de plan, je me laisse conduire par mon émotion. Les mots s’enchaînent assez naturellement, à chaque fois, j’écris entre quatre à six pages. J’ai souvent l’idée du prochain chapitre en me levant le matin, la nuit m’apporte l’émotion de la suite !
Envisagez-vous d’écrire un autre livre ? Si oui sur quoi avez-vous envie d’écrire pour ce prochain livre ?
Oui, après un tel accueil pour mon premier roman, l’envie est là. Actuellement, j’ai déjà le début et la fin du prochain en tête. Je visualise aussi sa structure générale. J’ai même commencé à écrire une vingtaine de pages. C’est un roman historique, forme que j’affectionne particulièrement, des années 1950 aux années 1980 en France. Le sujet principal est le thème de la double culture, celle de la deuxième génération de l’exil qui grandit en France avec un ailleurs en mémoire. Après l’histoire de mes parents, voilà le temps de l’histoire de mes sœurs, mes frères, mes cousines et mes cousins. Voilà le temps de mon histoire, de notre histoire.
Pascal Marcel auteur du livre Un aller simple disponible sur le site des Éditions Maïa. Cliquez ici pour le découvrir.