Ce manuscrit s’adresse tout particulièrement aux victimes de violences sexistes et sexuelles.
En l’écrivant, mon souhait était de me réapproprier mon histoire, mais aussi d’offrir un rayon de lumière, une lueur d’espoir, une main tendue, un souffle de sororité. Une petite flamme dans l’obscurité, pour toutes celles d’entre nous qui, un jour ou l’autre, ont été englouties par les ténèbres.
À vous, survivantes, qui vous sentez abandonnées, rejetées, invisibles, humiliées et méprisées. À vous qui portez, dans l’intimité de votre être, la violence subie, la douleur de l’indicible.

À celles d’entre nous qui ont l’impression que la terre entière se dresse contre elles, qu’elles perdent pied, que la solitude devient une complice implacable. À vous qui, parfois, croyez devenir « folles ».
À travers mon récit, je vous livre ce qui m’a engloutie, ce qui m’a broyée et m’a entraînée dans les abîmes de la solitude et de l’obscurité, mais aussi mes petites victoires.
Ces petites victoires qui m’ont permis de renaître, de reconstruire un chemin, de reprendre la parole. Celles qui m’ont guidée pas à pas vers la plus grande : celle de ma reconstruction. À travers mon récit, je vous invite dans cet espace fragile où j’ai moi aussi failli me perdre.
Ce manuscrit est un cri, une bouteille à la mer. Un appel, un cri du cœur, pour dénoncer les failles béantes du système de justice qui échoue encore et toujours à nous protéger. Il est un témoignage, un poing levé contre l’injustice, une réclamation de dignité.

Extrait du livre

Je suis spectatrice de ce glissement, de cette faille sismique qui me sépare de moi-même et qui emporte avec elle une partie de moi de manière définitive. Le plus dur c’était de se dire que dorénavant plus rien ne serait comme avant. Avant ? Avant c’était il y a quelques heures. J’avais la sensation d’avoir été bousculé dans une autre vie, une autre histoire, une histoire ou je suis spectatrice, ou tout m’échappe. Je ressens le vide vertigineux de cette faille et j’ai très peur. Je me rappelle faire des pieds et des mains pour faire marche arrière, revenir sur mes pas et serrer fort mes souvenirs, mes souvenirs de cette dernière journée, regarder mon visage insouciant, me serrer fort les bras une dernière fois avant l’apocalypse mais la porte s’était déjà refermée et scellée avant que je ne m’approche d’elle. Alors, je pleure, silencieuse, devant mon propre deuil intérieur.