Et s’il existait sur terre un endroit où tous les déçus, écorchés et blessés de la vie pourraient accoster et espérer tout recommencer, devenir qui ils voudraient sans être interrogés, empêchés, ou freinés par quiconque ? Un lieu paradisiaque bâti sur une société idéale où il serait possible de laisser ses secrets inavoués, ses blessures du passé derrière soi, repartir à zéro, se reconstruire et construire avec les échoués de la vie. Et si le meilleur des avenirs était envisageable, sur une île, en plein milieu de l’océan Pacifique ?

Anna espère avoir trouvé son havre de paix en y débarquant avec ses deux enfants, Juliette et Tristan. Ce qu’elle ignore encore c’est que les fantômes du passé ne lâchent pas si facilement leurs proies. Ils peuvent ressurgir sans crier gare, comme emportés et réveillés par la présence de la jeune femme, semer la confusion et le pire parmi les habitants. C’est ce voyage onirique sur fond de cauchemar que je vous propose de découvrir à travers mon manuscrit Les anges de l’Oubli.

Le genre humain a inspiré ce roman. Les émotions multiples dont les personnes sont traversées, les instants de suspension qu’elles vivent. J’ai voulu écrire un roman lumineux et sombre comme peut l’être n’importe quel individu. Un roman accessible, où chacun pourrait se reconnaître. Une bulle de rêve, loin du pathos, qui emporterait chaque lecteur vers un ailleurs onirique et inquiétant. Ce livre s’adresse à celles et ceux qui ont connu un jour la tempête, ou simplement le désir de retrouver un sens.

Extrait

Nous étions devant une modeste petite porte en bois blanc percée par des carreaux de verre. Un petit écriteau indiquait que c’était ouvert. Nous entrâmes.
– Hey ma Jackie !, cria une voix aux intonations américaines derrière un rideau de perle, entre ma belle.
La voix sortait d’une petite femme tout en rondeur, au visage jovial marqué par les années.
– Mais qui nous amènes-tu avec ?
Elle souriait et s’approchait de nous en s’essuyant les mains avec son tablier rouge et blanc noué autour de sa taille. Elle enlaça notre guide chaleureusement.
– Bonjour ma Rosy, je te présente Anna, Juliette et Tristan.
À cet instant, je cru apercevoir des larmes retenues dans ses yeux. C’était impossible. Il n’y avait aucune raison pour que cette femme, qui ne nous connaissait pas, ait envie de pleurer en nous présentant. La vieille dame s’arrêta, elle aussi, sur chacun de nous comme pour s’imprégner de nos visages, de notre odeur, de nos expressions même fugaces. Cela ne dura que quelques secondes mais elles semblèrent des heures. Il y avait quelque chose de gênant que je ne pouvais expliquer alors et qui nous incommoda. Juliette se retourna pour chercher mon regard et Tristan me prit la main. Dans un sourire, elle hocha simplement la tête et se détourna.
– Installez-vous, installez-vous. Je vais chercher de la citronnade pour vous rafraîchir le gosier et vous me direz après ce que vous désirez.
La pesanteur ressentie s’était soudain évaporée comme par magie, et nous nous installâmes tranquillement sur de ravissantes banquettes à carreaux rouge et blanc. D’ailleurs tout était dans ces tons, les abat-jours des lustres et des petites veilleuses bordant les tables, les rideaux, la frise cerclant la pièce, les serviettes, les menus. L’ensemble ressemblait à un gigantesque panier à pique-nique accueillant et chaleureux.
– C’est joli ici Maman, me dit Tristan en souriant.
– Ça te plaît mon chéri ?
– Oh oui alors, c’est chouette, reprit-il gaiement en rebondissant sur la banquette.
Il riait aux éclats.
– Regarde Maman, on dirait un trampoline.
Je ris de bon cœur aussi, j’aimais le savoir heureux. Tout n’avait pas été facile pour ce petit homme de quatre ans à peine. Alors, le voir se réjouir de ce petit moment si simple et si inattendu qu’offre parfois la vie, me réconforta et me fit penser que, peut-être, il n’avait pas autant souffert que je le pensais.
– Arrête Tristan ! répliqua sèchement sa soeur, tu vas nous faire remarquer !
– De qui ?, continua-t-il en riant encore plus fort, personne ne nous connaît ici.
– Pfffff, t’es nul et archi nul, et ben justement, j’ai pas envie qu’on nous connaisse comme ça !
– Alors… fit Rosy tout en déposant sa citronnade sur la table, vous avez choisi ?
Elle lança un clin d’œil à Tristan et dit en mouillant son crayon prêt à écrire sur son petit carnet à commande.
– Pour le petit acrobate, qui peut rebondir autant qu’il veut si ça lui chante, ce sera ma fameuse boisson bond et rebond, mon « orange secouée », pour la jeune beauté qui a envie de faire bonne impression même si elle n’en a pas besoin tellement elle est belle et intelligente, ce sera une pétillante « étoile du jour », et pour la maman qui a fait un long chemin pour arriver jusqu’ici mais qui peut se dire que le plus dur est derrière elle, ce sera ma spéciale bienvenue l’« accroche cœur », ça va lui faire du bien.
(…)
Je me rappelle parfaitement ce moment, cette parenthèse dorée, nous étions comme sur un petit nuage rouge et blanc en sirotant notre citronnade et nos boissons extraordinaires qui changèrent à tout jamais notre ordinaire. Nous riions heureux. Juliette et Tristan se parlaient gentiment. Jackie et moi discutions comme deux vieilles amies qui s’étaient vues la veille. Nous aurions pu tout affronter, nous étions forts. Et je me dis que c’est grâce à cet instant magique et à d’autres aussi que nous avons pu faire face à ce qui nous attendait au détour d’un chemin, et que nous étions loin d’imaginer.