Un jour d’automne, lors d’une promenade en solitaire dans un chemin forestier, me revint à l’esprit un peu de la philosophie apprise jadis au lycée.
Rousseau, le philosophe, la rêverie, la magnificence de la nature m’inspirèrent et la création d’un tel ouvrage devint alors pour moi une nécessité. Je pris donc la plume pour fixer ces instants d’émotion imprégnés de souvenirs, de réflexion et de rencontres imaginaires, comme celle de Voltaire.

Destiné à tous les admirateurs de la Nature, cet essai peut aussi attirer d’autres lecteurs dans une « ronde » poétique et philosophique où chacun peut se retrouver.

Les Chants du Soir

On ramassait quelques épis tombés d’une charrette à la dernière moisson, ces épis de blé que la bouche gourmande aimait mordiller jusqu’à ce que la graine livre son petit grain parfumé… Comme un geste d’Amour sans cesse répété.
Et la Vie s’écoulait entre les murs du Manoir, une rose à la bouche, la plume à l’encrier et le besoin d’Aimer… Les pas d’un jeune séducteur débutant, le parquet qui craquait, effet des sentiments, des plaisirs recherchés.
Puis, venait le temps des confitures et des tartes sucrées ! Le temps des aventures dans les vignes dorées ! Le temps de ces murmures de sources bien cachées, le temps de nos figures de jeunes anges dissipés… Le vent dans les ramures se plaisait à jouer, doigté en démesure, un musicien parfait.
L’Automne était déjà là, toujours pressé, l’été s’en allait là-bas par un chemin voilé. On cueillait des étoiles à la veillée, assis sur le pas d’une porte, le regard était de ciel, la lèvre de gaieté… on fredonnait, on riait, on pleurait peut-être même, l’encre avait déjà séché sur le dernier poème hâtivement composé.

Je m’en revenais au soir par le chemin des vignes, un dernier grain de hasard restait sur une grappe, oublié de la dernière vendange… Je le croquais, à la fois sucré et amer, desséché, il suffisait à ma soif et ma solitude passait…
Une cousine dont j’étais amoureux était repartie à la fin de l’été et le Manoir solitaire ne chanterait plus. Les oiseaux étaient déjà couchés et par ce beau temps clair clignaient des étoiles pleines d’humilité. Au milieu des vignes du grand-père, de la terre à mes souliers, j’étais ce promeneur, les cheveux en bataille, avec l’espoir, tout l’espoir d’être aimé.
Un piano en écho et le chant de la mer, la présence des lumières entre ciel et marée, tout était beau, tout était grand…
Il faut avoir connu ces instants qui se prolongent dans le cœur et dans les yeux.