Suzanne : Une enfance dans la guerre, est le témoignage poignant de la mère de l’auteur qui raconte, avec ses mots, et sa gouaille, l’enfer d’une guerre qui lui aura pris sa mère et son enfance. Elle n’avait que six ans quand l’aigle du Reich d’Hitler a déployé ses ailes de cuir sur le monde.
L’originalité de cette histoire réside dans les émotions palpables d’une octogénaire qui se livre, se dénude sans prétention. Un cri du cœur pour ne pas oublier les victimes, pour ne pas oublier qu’à l’âge de faire des cabanes, de jouer à la poupée ou au cerceau, les enfants de la guerre fuyaient les bombardements et la mitraille.
Un récit troublant qui ne laisse personne indifférent.

Extrait

… Tout ce qui était rattaché à la France devait disparaître, comme la presse française, la monnaie et les timbres français. Même les enseignes des magasins et les noms des rues ont été germanisées, les noms des villes et des villages aussi. Les statues française ont été déboulonnées et les monuments aux morts aussi ont été germanisés. Dans les bibliothèques il n’y avait plus un seul livre en français. La germanisation de la région passait aussi par l’exclusion des indésirables, à savoir, les juifs, les nord-africains, et plus largement, les francophiles et les francophones. C’est simple, leur but était de faire de l’Alsace et de la Lorraine des territoires nazis. La politique nazie se résumait par ce slogan « Ein Folk, ein Reich, ein Führer ! » autrement dit : « Un Peuple, un Empire, un Chef ! ». On était sous contrôle permanent et gare à ceux qui voulaient se soustraire au régime nazi en fuyant vers la Suisse, ce qui restait très compliqué, ou en zone libre. Les répercussions pour les proches étaient sanglantes. Torture, déportation, exécution sommaire. Les SS régnaient par la terreur.
– Et à l’école, comment se déroulait les cours ? Demanda Max.
– C’était terrible ! S’exclama Suzanne en colère. Les cours ne commençaient jamais par bonjour Monsieur, ou bonjour Madame. Nous devions nous tenir debout à nos pupitres, droit comme un I en tendant le bras droit et crier haut et fort à trois reprises, Sieg Heil ou Heil Hitler. Ensuite on nous apprenait tous les chants patriotiques et la vie et l’histoire d’Adolphe. Tout ça sur fond d’alertes à la bombe. Alors on se réfugiait dans la cave de l’école où le cours reprenait en attendant la fin de l’alerte. On avait intérêt à tout savoir par cœur sinon c’était la règle au bout des doigts et d’autres sanctions plus sévères.
Suzanne marque une pause. Encore une fois elle détourna son regard de celui de son invité, sans doute pour lui cacher ses larmes.
– Voulez-vous me parler des autres sanctions ?