Entretien avec Jean Delorme – Éloge d’une économie de précaution

Entretien avec Jean Delorme – Éloge d’une économie de précaution

Quels ont été les retours des premiers lecteurs ? Que vous ont-ils dit sur votre livre ?

Philippe Guerin, ancien ambassadeur, polytechnicien comme l’a été son père et son grand-père après une lecture attentive m’a adressé par mail cette réflexion :

Bonjour Jean. 

Je viens de terminer ton livre. Évidemment il ne se lit pas comme un roman policier et il demande de la réflexion et du temps pour digérer,  même s’il est fort bien écrit dans un style fluide et contenant de belles formules et des expressions heureuses.

C’est un ouvrage très ambitieux et qui témoigne de ta puissance de réflexion et de ta pensée créative, basées sur une très vaste culture à la fois philosophique, politique, économique… Et ta réflexion puise aux sources de la sagesse orientale aussi bien que gréco-romaine et englobe donc l’Homme universel.

J’ai apprécié la pertinence de ta pensée sur les abus du libéralisme et la collusion fréquente des dirigeants et du capitalisme. Également sur l’écrasement des classes moyennes, pourtant moteur indiscuté de nos sociétés, sous les impôts et les mesures de toutes sortes, ainsi que sur la paupérisation d’une partie grandissante de la population et la situation dramatique des agriculteurs. 

Ton constat est extrêmement bien documenté sur l’évolution du monde, qui va droit dans le mur, et sur les nombreux travers de nos sociétés modernes ( consumérisme sans limites, destruction de la nature, etc..). D’autre part, il se détache des ouvrages des spécialistes en ce sens qu’un économiste écrira naturellement un livre d’économie tandis qu’ un philosophe écrira un livre de philosophie. Chacun reste cantonné dans son sujet. Nul lien avec les sujets des autres et aucun dépassement de sa matière. Pas de synthèse. Un psychanalyste ne sait faire que de la psychanalyse, sauf de façon amusante si le politiquement correct lui fait prendre des positions qui ignorent l’invention de la psychanalyse.

 C’est ainsi que j’avais lu dans un livre d’interviews de jeunes Jamaïcains immigrés en Angleterre que certains avaient eu comme principale motivation leur attraction pour les femmes blanches. Ceci me paraissait rejoindre la théorie freudienne. Or a-t-on jamais vu sur un plateau de télévision un psychiatre avancer cette explication parmi celles qui expliquent l’immigration. C’est un tabou. Ils deviennent tout d’un coup économistes ( le misère, la croissance démographique) ou politologues ( les dictatures, les guerres). Freud qui c’est ? Connais pas. Le politiquement correct faisant perdre leur latin aux psychanalystes est malheureusement si typique de notre société actuelle…

 Ton livre vise haut. Et est aussi courageux. 

Tu n’hésites pas à critiquer les responsables ( très nombreux, y compris nous-mêmes) de la situation actuelle et des sombres perspectives que nous avons devant nous. Parmi les plus irresponsables je citerai quand même les Africains dont la croissance démographique effrénée est porteuse de futures catastrophes. On entend pourtant des spécialistes de ce continent avancer qu’il reste énormément de terres à défricher en Afrique et qu’il y aura largement de quoi accueillir et donner à manger aux centaines de millions de nouvelles bouches à nourrir. C’est une absurdité. Ce discours me parait marqué par la complaisance et sans doute aussi par l’intérêt, car on reste ainsi bien vu des Africains et l’on continue à recevoir des invitations des université d’Abidjan ou de Dakar, de Lomé ou de Cotonou…. Pas désagréable.

La partie contenant tes propositions, très étudiées et soigneusement décrites, est évidemment la plus ambitieuse. Tout s’enchaîne logiquement et l’économie de précaution que tu prônes apparaît comme une solution pour faire changer de cap à la société. Cependant la tâche est bien sûr colossale. D’abord pour faire monter à bord ceux que tu désignes comme la force vive du projet, les entrepreneurs du sens. Un énorme travail de conviction sera sans nul doute nécessaire. D’abord parce que certains pourraient juger le projet comme étant quelque peu utopiste et pourraient avoir du mal à s’engager. D’autre part, j’imagine que contrairement à toi qui te détaches complètement du lot, ces entrepreneurs du sens risquent d’éprouver quelques difficultés à te suivre dans la grande partie à dominante phoilosophique du livre. J’imagine, mais peut-être à tort, que la plupart sont surtout des hommes d’action, entreprenants et audacieux, pas forcément portés sur l’abstraction philosophique.

Voilà cher Jean, quelques réflexions qui me viennent à l’esprit. Evidemment ça ne concerne que quelques points de ton ouvrage. Compte tenu de tes très nombreuses réflexions et propositions, il sera impossible de vouloir tout commenter.

A bientôt.

Amitiés
Philippe

Quelle est l’originalité de votre livre selon vous ? A-t-elle été perçue par vos premiers lecteurs ?

Dans la réponse de Philippe Guerin vous avez pu remarquer qu’il signalait à juste titre les deux difficultés à venir. J’étais parfaitement conscient de celles-ci. Je lui répondais avec un Powerpoint qui me sert pour mes conférences. Je vous adresse à nouveau sa réponse qui pour moi est parfaite :

Bonjour Jean

J’ai lu ton document et j’ai admiré ton savoir faire. S’agissant du caractère pouvant passer pour un peu utopique de ton projet, tu as retourné, en quelque sorte, la charge de la preuve. Et c’est très convaincant. En effet, tu démontres bien que les utopistes sont bien davantage ceux qui croient pouvoir continuer avec le système actuel, avec le confort et les avantages qu’il leur procure ( pour l’instant), que ceux qui ont pris conscience qu’il était impératif de modifier ce système pour ne pas aller dans le mur. Très bien joué ! Et le document en général a de l’allant et du punch, bien fait pour emporter l’adhésion.  Beau travail !

Voilà, les réflexions que modestement ton document m’a inspirées. 

A bientôt.

Philippe

Envisagez-vous d’écrire un autre livre ? Si oui, sur quoi avez-vous envie d’écrire pour ce prochain livre ?

Oui, j’ai plusieurs livres qui sont en route et qui n’ont rien à voir avec le genre de mon dernier livre. Mais, il y a une suite à l’éloge d’une économie de précaution qui sortira après mon ouvrage, ce sont les 100 guides sur les entrepreneurs du sens ( un guide par département). Mon ambition est de les écrire avec d’autres journalistes ou écrivains, car ce travail est important et hors de portée d’un seul auteur. Il concernera des centaines d’auteurs.

Jean Delorme, auteur de Éloge d’une économie de précaution, disponible sur le site des Éditions Maïa. Cliquez ici pour le découvrir.