
Entretien avec Jean-Pierre Andriot auteur de Drôle d’époque
Quel a été votre sentiment quand votre livre est paru ?
Ce fut en fait un mélange de sentiments, d’abord évidemment la satisfaction de voir prendre forme le fruit de son travail et ce dont on a rêvé, tout en restant parfaitement conscient que la parution d’un livre n’est que la première étape et que son éventuel succès reste très hypothétique. La publication d’un livre n’est en aucun cas gage de réussite dans la mesure où l’auteur n’en maîtrise pas la plupart des paramètres.
Le second sentiment, intimement mêlé au premier, a donc été le doute. Le livre allait-il trouver ses lecteurs ? Correspondrait-il à une attente particulière ? Avait-il été édité au bon moment ? Ces questions sont d’autant plus cruciales que les thèmes traités dans mon livre sont en rapport direct avec une réalité dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle est anxiogène.
Quels ont été les retours des premiers lecteurs ? Que vous ont-ils dit sur votre livre ?
Les retours ont été de manière générale positifs en ce qui concerne l’écriture elle-même et la façon dont j’ai pu traiter tel ou tel thème d’actualité. Par contre – et je dois dire que je m’y attendais – les lecteurs ont aussi relevé le côté un peu pessimiste de certaines parties, ce qui était pourtant sous-jacent dans le titre « Drôle d’époque ».
Lors de mes dédicaces, j’avais d’ailleurs pris soin d’inciter les lecteurs à dépasser ce pessimisme au premier degré pour ne retenir, après lecture des points négatifs, que l’optimisme final, comme une fenêtre ouverte sur un avenir que nous avons la possibilité de changer en faisant évoluer nos comportements.
Que retenez-vous de cette expérience d’édition par rapport à votre travail d’écriture ? En avez-vous tiré des enseignements ?
C’est toujours une expérience enrichissante dont on peut chaque fois tirer quelques leçons qui se révèleront certainement très utiles lors d’une éventuelle prochaine édition. Je ne suis pas du tout sûr d’avoir fait éditer ce livre au bon moment, même si j’ai l’intime conviction que certains de nos comportements doivent être dénoncés parce qu’ils mettent en danger non seulement le monde actuel mais surtout celui dans lequel vont vivre nos enfants.
Je pense que les gens ont de plus en plus besoin soit de se changer les idées en s’évadant de la réalité, soit d’être étonnés en découvrant ce qui peut se cacher derrière ce qu’ils croient maîtriser ou savoir. Le choix des thèmes ne suffit donc pas à garantir l’intérêt du lecteur, le moment où le livre sera édité me parait aussi très important, ce dont je n’avais pas vraiment conscience jusqu’à présent.
Quelle est l’originalité de votre livre selon vous ? A-t-elle été perçue par vos premiers lecteurs ?
Son originalité – si tant est qu’il en ait une et ce n’est pas vraiment à moi d’en juger – réside peut-être dans le fait que l’écriture ne cherche ni à farder ni à enjoliver la réalité. Mais ce choix se révèle risqué et peut devenir un piège dans la mesure où la tendance actuelle de la société consisterait plutôt à détourner le regard pour fuir une réalité qui n’a effectivement rien de bien réjouissant.
Dans cette société où le paraître prime l’être et où le virtuel prend toujours plus d’importance, il n’est apparemment ni bon, ni conseillé d’affronter le réel.
Je pense, d’après leurs retours, que les lecteurs ont effectivement perçu cette ambiguïté.
Comment s’est passé votre travail d’écriture ? Avez-vous une méthode pour écrire ? Des rituels ou des astuces ?
Il y a dans le mot « travail » une notion d’effort qui ne correspond pas vraiment à l’écriture, du moins en ce qui me concerne. A partir du moment où le thème d’écriture est défini – c’est peut-être là que réside la principale difficulté – les idées prennent forme assez rapidement et après un premier « jet » sur le dictaphone, toujours lors d’une marche, d’une balade en pleine nature ou d’une sortie à vélo, il reste à les affiner et à les coucher sur papier. Rien n’est jamais définitif et à chaque relecture il y a toujours quelque chose à reprendre, à rectifier ou à corriger.
Envisagez-vous d’écrire un autre livre ? Si oui sur quoi avez-vous envie d’écrire pour ce prochain livre ?
Peut-être, je suis effectivement en train d’écrire un autre livre dont le thème est tellement vaste que j’ai quelques difficultés à le limiter. Le titre « Histoires de nombres » explique à lui seul ces difficultés. En effet, les nombres qui constituent la trame de cet éventuel prochain livre sont l’occasion pour moi de raconter des histoires. Comme disait Pythagore, « les nombres gouvernent le monde », ils le façonnent au point que « toute chose est nombre ». Ils sont notamment présents dans d’innombrables expressions que nous utilisons dans la vie quotidienne en ignorant parfois quelle est leur origine. Certains nombres me permettent d’aborder des sujets très divers et d’évoquer des personnages, des objets, des évènements ou même des lieux.
A titre d’exemple, voici quelques sujets qui illustrent la diversité des thèmes abordés à partir d’un nombre : l’affiche rouge, les carrés magiques de Gaudi et de Dürer, les enfants d’Izieu, le monde de Georges Rémi, la liberté d’expression, les cercles de l’enfer, les travaux d’Hercule, le nombre d’or, le rugby, la Réforme, la Shoah … Derrière chacun de ces thèmes se cache un nombre !
Jean-Pierre Andriot, auteur de Drôle d’époque, disponible sur le site des Éditions Maïa. Cliquez ici pour le découvrir.