Entretien avec Marc Joncour – Les corbeaux n’ont pas d’oreilles

Entretien avec Marc Joncour – Les corbeaux n’ont pas d’oreilles

Quel a été votre sentiment quand votre livre est paru ?

Dans un premier temps, un soulagement – tout le travail réalisé ne l’a pas été en vain – et une grande satisfaction – celle de tenir en main le papier, le support des mots, imprimés, ineffaçables et fruits de mon imagination, bref, l’objet qui concrétise des mois d’efforts et qui surtout, quoi qu’il arrive ensuite, restera et vivra dans le temps.

Dans un second temps, l’espoir de trouver des lecteurs – « mes lecteurs » – et de leur procurer le même plaisir et les mêmes émotions que ceux ressentis par mes tout premiers lecteurs.

Quels ont été les retours des premiers lecteurs ? Que vous ont-ils dit sur votre livre ?

J’ai d’abord donné à ma famille et à des amis proches une version non encore définitive du roman. Leurs retours, largement positifs et argumentés, m’ont incité à apporter quelques retouches au texte avant de sceller la version finale que j’ai alors soumise à un groupe de lecture dont je connaissais l’animatrice. Le verdict des lecteurs, trois femmes et trois hommes, pour la plupart retraités, m’a totalement rassuré : cinq d’entre eux étaient vraiment « emballés ». Puis, le retour d’un écrivain connu, Henri Girard, a achevé de me convaincre de rechercher un éditeur : « J’ai lu avec beaucoup de plaisir ce roman fort bien écrit avec une rigueur implacable, le souci du détail et un réalisme absolu. Le scénario est aux petits oignons et l’histoire nous bringuebale aux quatre coins du monde. Joli voyage en politique fiction… » m’écrivait-il.

Le livre est paru en juin dernier, juste avant la période, tellement propice à la lecture, des vacances estivales. Les retours globalement très élogieux que j’ai alors reçus de ces nouveaux lecteurs, exprimaient tous le plaisir qu’ils avaient éprouvé avec une intrigue palpitante et des personnages qui « nous captivent, nous surprennent et nous émeuvent ».

Que retenez-vous de cette expérience d’édition par rapport à votre travail d’écriture ? En avez-vous tiré des enseignements ?

Durant la longue période de l’écriture, j’avais un but exclusif, celui d’aboutir au manuscrit quasi-définitif. Ce n’est qu’une fois ce cap franchi que je me suis posé la question de l’édition. La rédaction de la quatrième de couverture, tout autant que la recherche et le choix de l’image de la couverture, mais aussi du type et du style des caractères formant le titre du livre, sont des étapes importantes, peut-être même cruciales, pour la suite. Quand vous avez le livre en main, c’est ce que vous voyez d’abord, ce qui va provoquer ou non le désir d’ouvrir et de feuilleter les pages. Il était donc essentiel de ne pas se tromper dans ces choix.

Quelle est l’originalité de votre livre selon vous ? A-t-elle été perçue par vos premiers lecteurs ?

Dans le livre, le narrateur est un écrivain à succès dont le dernier roman, traduit en mandarin, rencontre en Chine un succès inédit et phénoménal. Pourtant, il est victime du syndrome de la page blanche et se révèle incapable, depuis de nombreux mois, de démarrer l’écriture du nouveau roman qu’il doit, par contrat, à son éditeur. Une rencontre provoque enfin le déclic et l’amène à retrouver l’inspiration et l’envie d’écrire ; ce qui va l’entraîner dans des aventures parfois périlleuses. A ce propos, Henri Girard m’écrit : « L’idée d’y inscrire l’histoire du romancier « en panne sèche » est fort judicieuse et subtile, conférant à l’ensemble une belle dramaturgie jusqu’au dénouement. »

La deuxième originalité du livre m’a été signalée par l’un des premiers lecteurs. Elle concerne le rythme effréné des évènements qui se déroulent dans des lieux constamment différents avec des personnages eux aussi différents. L’alternance d’épisodes d’action intense et de passages plus apaisés et plus lents consacrés à la réflexion des personnages, ont conduit mon lecteur à évoquer « La condition humaine » d’André Malraux.

Dernière originalité du livre, si j’ose dire : le titre du roman « Les corbeaux n’ont pas d’oreilles » n’a que très peu à voir avec l’histoire et avec l’intrigue. Toutefois, le lecteur comprend assez vite le pourquoi de ce titre.

Comment s’est passé votre travail d’écriture ? Avez-vous une méthode pour écrire ? Des rituels ou des astuces ?

Mon postulat de départ était que l’action se situerait dans un avenir assez éloigné, à la fin de ce siècle ou au début du siècle suivant. Je voulais aussi que le contexte géopolitique dans lequel se déroulent les évènements soit constamment en toile de fond. Dès lors, ce futur relativement éloigné m’autorisait une grande liberté, notamment quant à la vraisemblance des situations au regard de celles du monde d’aujourd’hui. Je suis donc parti d’un évènement planétaire considérable et exceptionnel, vécu par ceux qui allaient devenir les principaux personnages du livre. Au départ, je n’avais rien de plus ni aucun plan préconçu. C’est à partir de cette situation initiale, en totale empathie avec mes personnages, que je les ai laissé vivre leur vie, au gré de mon imagination mais surtout de leur personnalité et de leur caractère.

Ma méthode pour écrire est simple : je n’en ai pas. Je vis à chaque instant avec mes personnages et avec les situations auxquelles ils sont confrontés. Je ne m’impose aucun horaire et aucune contrainte particulière. D’une manière générale, j’effectue mes recherches dans la journée et j’écris la nuit, au calme, dans le silence le plus complet. Sur mon ordinateur, j’ai à tout moment, à portée de clic, le dictionnaire « cnrtl » et le dictionnaire des synonymes « crisco » de l’université de Caen, afin de chercher et de trouver en permanence le mot juste, celui qui exprimera le mieux une idée, une émotion, un sentiment…

Envisagez-vous d’écrire un autre livre ? Si oui, sur quoi avez-vous envie d’écrire pour ce prochain livre ?

Bien sûr, j’envisage un autre livre. Plusieurs sujets me trottent dans la tête. Ces derniers mois j’étais plus préoccupé par la diffusion et la promotion de mon livre. Mais je sens poindre, une fois de plus, cette envie d’écrire et de passer à nouveau des nuits blanches avec mes personnages et devant l’écran de mon ordinateur, et ceci au grand dam de mon épouse.

Marc Joncour, auteur de Les corbeaux n’ont pas d’oreilles, disponible sur le site des Éditions Maïa. Cliquez ici pour le découvrir.