Entretien avec Bertrand Durovray – Tuez-les tous !

Entretien avec Bertrand Durovray – Tuez-les tous !

Quel a été votre sentiment quand votre livre est paru ?

Cela a été un sentiment fort, proche de celui que l’on peut ressentir quand on s’octroie la possibilité de souffler un peu après avoir réalisé quelque chose d’important. Une publication est une sorte d’accomplissement, d’autant qu’il s’agit ici d’un premier roman, écrit de surcroît près de deux ans auparavant. Entre l’idée du roman et sa forme physique, il y a donc eu un long cheminement, qui explique certainement l’intensité de sa réception.

Quels ont été les retours des premiers lecteurs ? Que vous ont-ils dit sur votre livre ?

Les premiers retours des lecteurs ont été très positifs, ce qui n’était pas garanti étant donné la radicalité formelle du livre. Mais ces lecteurs ont soit compris mon intention lors de son écriture (rêve ultime de tout auteur), soit fait preuve de bienveillance à mon égard, soit encore ils sont entrés dans l’histoire et ont été captés par l’intrigue et l’enquête que devait mener le personnage principal… Ils ont notamment vanté l’originalité du propos et l’humour du texte. Mike, par exemple, m’a assuré avoir « dévoré le livre en une soirée » ; quant à Brigitte, elle m’a comparé au grand auteur de polar James Hadley Chase. Un honneur !

Que retenez-vous de cette expérience d’édition par rapport à votre travail d’écriture ? En avez-vous tiré des enseignements ?

L’expérience de l’édition est complètement différente du travail d’écriture, on aurait presque tendance à dire qu’ils sont dissociés. Ce n’est évidemment pas le cas, le manuscrit (et son contenu) agissant comme un fil d’Ariane entre les deux. Cependant, alors que l’écriture est solitaire, l’édition requiert la participation de différents intervenants. C’est là, l’enseignement que j’ai tiré de cette expérience : j’ai trouvé particulièrement enrichissant de confronter mes écrits (dans toute la perfection qu’il me semblait possible d’atteindre) à l’avis de professionnels du livre… afin d’en tirer un texte encore meilleur !

Quelle est l’originalité de votre livre selon vous ? A-t-elle été perçue par vos premiers lecteurs ?

L’originalité du livre réside principalement dans son ton. En effet, s’il reprend les codes du roman policier (meurtre, enquête…), il les détourne également. Ainsi, Tuez-les tous ! est un polar sans policier. Et s’il y a bien une enquête, celle-ci est menée par un journaliste débutant qui se trompe, refuse de reconnaître ses erreurs et invective même le lecteur (autre caractéristique peu conventionnelle). Cela a comme effet de ne pas laisser indifférent. D’ailleurs, les lecteurs l’ont bien relevé, parmi d’autres qualités telles que le rythme et ses nombreux rebondissements qui maintiennent en haleine ou encore la radicalité de son écriture.

Comment s’est passé votre travail d’écriture ? Avez-vous une méthode pour écrire ? Des rituels ou des astuces ?

Je n’ai pas de rituels d’écriture. Chaque projet étant unique, mon travail s’y adapte. Pour ce livre, que je voulais court et nerveux, j’ai adopté une écriture rapide et me suis attaché à écrire un premier jet, complet, en moins d’un mois. Mais comme ce rythme ne correspond pas à l’écriture « normale » d’un roman, j’ai ensuite pris un autre rythme et ai consacré près d’un an au travail de relecture et de correction. Au final, j’ai obtenu ce que je désirais, à savoir un manuscrit vif et abouti.

À force d’écriture, on ne développe pas de technique à proprement parler (quand on commence un nouveau texte, c’est toujours sur une page blanche, peu importe le nombre de manuscrits que l’on a achevés antérieurement). En revanche, avec le temps, on gagne en confiance en soi (ce qui ne veut pas dire que l’écriture ne se déroule plus sans rencontrer de difficultés, simplement on doute moins de ses aptitudes à les surmonter) et on trouve des astuces nous permettant parfois de contourner certains écueils. Pour lutter contre l’un des principaux risques qui guette tout écrivain débutant un manuscrit (le fameux syndrome de la peur de la page blanche), je me suis ainsi rendu compte qu’il pouvait être utile de créer une diversion : si vous perdez vos moyens au moment de vous installer derrière votre ordinateur, changez de cadre ! N’écrivez donc pas dans ce cadre a priori propice qui annihile en réalité la créativité mais dans des circonstances qui, au contraire, ne devraient pas l’encourager : en faisant votre repassage, façonnez mentalement une plusieurs phrases parfaites que vous vous précipiterez ensuite de recopier, dans une file d’attente sur un bout de papier, dans votre voiture sur un dictaphone, qu’importe l’endroit du moment que ce n’est pas un ordinateur sur un bureau. Comme celui qui doit absolument dormir tôt pour être en forme le lendemain se prépare une longue nuit blanche, si vous ne devez pas écrire votre créativité sera décuplée. Inversement, devoir écrire met un poids qui écrase et étouffe ces velléités. Au final, vous aurez écrit et passé le cap toujours délicat de l’ébauche d’un manuscrit et même si ce n’est pas le cas, cela n’aura que peu d’importance puisque vous n’étiez pas censé écrire en allant à la Poste. Et que vous aurez au moins terminé votre repassage !

Envisagez-vous d’écrire un autre livre ? Si oui, sur quoi avez-vous envie d’écrire pour ce prochain livre ?

Lorsque j’ai signé mon contrat avec les éditions Maïa, j’ai volontairement fait une pause dans mon travail d’écriture et ce, pour deux raisons : d’une part, je voulais vivre pleinement cette expérience de publication et être disponible pour m’impliquer dans toutes les étapes du processus éditorial, qu’il s’agisse de la campagne pré-promotionnelle sur Simply Crowd, des corrections du livre, de ma participation à la conception de sa couverture ou encore de sa promotion ; d’autre part, je désirais accompagner au mieux l’ouvrage afin de lui donner toutes les chances de rencontrer son public. Aujourd’hui seulement, je commence à caresser l’idée d’un nouveau livre mais, de la même manière que l’on songe délicieusement au choix de notre prochaine lecture, je rêve ce nouveau projet davantage que je le concrétise. Je n’ai pas de livre en cours mais des idées, et des envies qui, peut-être, déboucheront sur un manuscrit. Je ne peux donc pas dire quel en sera le sujet mais ce dont vous pouvez être persuadés, c’est qu’il sera surprenant. Et que Maïa sera le premier éditeur à qui je le présenterai, comme un juste retour pour l’éditeur qui, le premier, m’a fait l’honneur de me publier.

Bertrand Durovray, auteur de Tuez-les tous!, disponible sur le site des Éditions Maïa. Cliquez ici pour le découvrir.