Entretien avec Catherine Sirben – Échapper

Entretien avec Catherine Sirben – Échapper

Quel a été votre sentiment quand votre livre est paru ?

J’ai eu beaucoup de plaisir, c’était un accomplissement, un moment qui a confirmé que j’avais réalisé quelque chose jusqu’au bout. Je ne pouvais plus rien modifier, et le texte allait s’offrir tel que je l’avais défini. Il y a un moment quand on crée, où on se dit que « c’est fini, on ne touche plus à rien », et là, je me suis engagée à un moment pour ce choix, et j’ai confié le texte à l’éditeur. Après, j’étais fébrile, j’attendais que le colis arrive pour le livre, le toucher !

Quels ont été les retours des premiers lecteurs ? Que vous ont-ils dit sur votre livre ?

Mes premiers lecteurs sont des personnes qui me connaissent bien, c’est-à-dire avec mes défauts et mes qualités, mes choix de vie, mes positionnements divers, mes autres créations (comme la peinture ou les photos, celle de la couverture est de moi). La plupart m’ont retrouvée dans l’écriture, ils ont été sensibles aux lieux décrits qui les ont beaucoup touchés car ils les connaissent pour la plupart, mais aussi par les sentiments éprouvés pas l’héroïne du roman. À travers elle, ils ont pu se retrouver là où eux-mêmes avaient marché, déambulé avec certains détails qui sont propres à ces endroits. Certains y ont vu un récit fait de touches comme un tableau. Nombreux sont ceux qui ont commencé à lire sans pouvoir arrêter, ils voulaient savoir la fin, et ne s’attendaient pas à ce qui se passe.

Que retenez-vous de cette expérience d’édition par rapport à votre travail d’écriture ? En avez-vous tiré des enseignements ?

Quand j’ai contacté les Éditions Maïa, j’étais désabusée, car depuis trois ans, j’avais contacté des éditeurs qui n’étaient pas intéressés, ou qui ne répondaient même pas…ou alors des éditeurs à compte d’auteur qui se précipitaient sur la marchandise…pour faire du commerce. C’est un milieu que je ne connais pas et je ne voulais pas faire d’erreur, me retrouver piégée par un contrat flou, ou une situation qui m’aurait échappé. Là, ça m’a paru clair, simple, et j’avais un sentiment de confiance. Le résultat me convient bien, par contre, je ne suis pas très douée pour faire la VRP et faire connaître mon roman. Même si j’ai contacté pas mal de librairies, quelques journaux et émissions de radio, je ne me vois pas créer un site sur un réseau pour parler de moi et de ce que je fais. Ce n’est pas vraiment ma façon d’agir et là, j’ai du mal à me faire violence ! Même dans mon entourage proche, certains ne sont pas au courant, c’est comme si ça me gênait de leur dire… alors que je n’ai jamais été gênée d’exposer des peintures et de faire venir du monde aux expos. En écrivant j’ai l’impression de me mettre à nu, de devenir transparente… en réalité, ça dépend totalement du lecteur.

Quelle est l’originalité de votre livre selon vous ? A-t-elle été perçue par vos premiers lecteurs ?

D’abord, quand je l’ai écrit, je n’ai pas cherché l’originalité. J’avais commencé un texte plusieurs années auparavant…et j’ai voulu le continuer. Il m’a permis de me libérer de certains souvenirs qui n’ont pas vraiment à voir avec l’héroïne. C’est assez étrange. L’histoire est très banale mais elle est vécue à travers beaucoup de ressentis, de visuels, de telle sorte que les lecteurs se sont fondus dans le personnage, se sont vus à sa place, ont ressenti comme elle…Franchement, j’ai été très surprise par les commentaires des lecteurs : non seulement ils ont étés « pris à la gorge » pour certains par les sensations, mais encore, ils ont cherché à comprendre comment cette jeune femme allait avancer dans son histoire. Ils ont trouvé le texte fluide malgré les descriptions. Une amie m’a dit que c’était le premier roman qu’elle lisait où le suspense était tenu par les sentiments et sensations de l’héroïne. Et une autre m’a demandé comment je pouvais décrire à ce point des sensations qu’elle avait vécues sans pouvoir les traduire elle-même.

Ça m’a fait plaisir de trouver cette même sensibilité chez mes lecteurs car j’avais peur que cette histoire soit jugée telle une bluette pour fille superficielle, et ça a été tout le contraire. Même les messieurs ont apprécié et ont commenté de manière très pertinente le texte et toujours, au sujet des sensations et sentiments. Certains ont perçu de la poésie en prose, d’autres se sont immergés dans les lieux avec bonheur.

Comment s’est passé votre travail d’écriture ? Avez-vous une méthode pour écrire ? Des rituels ou des astuces ?

J’écris quand j’ai le temps, quand j’ai vraiment envie. Parfois j’ai envie, mais je suis occupée à autre chose, et c’est très frustrant car j’ai peur d’oublier ce que je veux écrire ! J’écris à la main, au stylo encre, c’est très agréable. Je n’ai aucun rituel, aucune astuce… j’aimerais parfois ne pas me coucher ou me lever la nuit pour écrire, mais ce n’est pas très raisonnable quand il faut aller travailler le lendemain ! Je suis assez septique sur les « méthodes » pour apprendre à écrire ceci ou cela. Je ne vois pas comment c’est possible. Je crois que c’est en soi, c’est assez inexplicable. J’ai toujours écrit depuis que j’ai 4 ans… et ce qui ressort là dans ce roman est bien minuscule par rapport à ma vie.

Envisagez-vous d’écrire un autre livre ? Si oui, sur quoi avez-vous envie d’écrire pour ce prochain livre ?

Je pense que oui. Certains ont insinué qu’ils aimeraient une suite à Échapper car ils sont allés au-delà du mot « fin », Maria existe pour eux, ils veulent savoir ce qu’elle va devenir. Alors, je ne sais pas pour le moment si ce sera possible. Sinon, j’ai une autre idée, qui serait plus emprise d’humour mais qui n’est pas aboutie pour le moment. En réalité, je ne parle à personne de ce que je fais, c’est un processus très personnel, très privé ; je ne fais rien lire, je ne demande aucun avis, créer, écrire est très intime pour moi. Même si je ne suis sûre de rien, je ne me vois pas partager mes doutes ! Je crois que ça me plongerait d’autant plus dans une situation impossible. Le texte naît dans notre imaginaire, et je ne vois pas comment il peut être partagé au moment où il jaillit.

Catherine Sirben, auteur de Échapper, disponible sur le site des Editions Maïa. Cliquez ici pour le découvrir.